6ème dimanche de Pâques

6ème dimanche de Pâques.  Jean 14, 15 - 21.

 

Le texte.       

(Les mots en italique sont plus proches de l’original que ceux du missel.)

A l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père (1), il disait à ses disciples : « Si vous m’aimez (2), vous garderez mes objectifs. Moi, je prierai le Père et il vous donnera un autre Défenseur (3) qui sera pour l’éternité (4) avec vous : c’est l’Esprit de vérité.  Le monde (5) est incapable de le saisir, parce qu’il ne le voit pas et  ne le connaît pas. Mais vous, vous le connaissez, parce qu’il demeure auprès de vous, et qu’il est en vous. Je ne vous laisserai pas orphelins, je reviens vers vous. D’ici peu de temps, le monde (5) ne me verra plus, mais vous, vous me verrez vivant, et vous vivrez aussi. En ce jour-là, vous reconnaîtrez que je suis en mon Père (6), que vous êtes en moi, et moi en vous. Celui qui a saisi mes objectifs et les garde, c’est celui-là qui m’aime. Et celui qui m’aime sera aimé de mon Père. Moi aussi je l’aimerai, et je me manifesterai à lui. »

(1) Cette dernière grande  prière de Jésus se passe donc  à la dernière Cène.

(2) En langue grecque, il y a plusieurs mots qui traduisent le verbe aimer en français : ‘philia’ (inclination, affection, amitié),  ‘eros’ (amour passionnel) et ‘agapè’ (amour, accueil plein d’affection, notamment le ‘petit’, le ‘prisonnier’, l’étranger’). C’est le verbe ‘agapeo’ qui encadre ce passage.

(3) En grec, le paraclet, littéralement celui qui est ‘appelé auprès de’, qui ‘vient soutenir’....  

(4) Eternité ne signifiait pas ce qui n’a pas de fin mais ce qui est plein de la vie de Dieu

(5) Dans le 4e évangile, « monde » peut avoir deux sens. Il peut désigner soit le lieu dans lequel l’être humain naît, vit, meurt. Ainsi, en Jean 1, 9 : Le verbe était la vraie lumière qui, en venant dans le ‘monde’, illumine tout homme. Mais il peut avoir aussi une connotation péjorative et désigner ce qui s’oppose à Dieu. Comme ici : le monde qui est incapable de s’ouvrir à l’Esprit de vérité et cela parce qu’il le rejette pour le moment.

(6) Comme dimanche dernier, Jésus affirme qu’il est « dans le Père ».

 

NB à propos des notes. Un jour quelqu’un m’a dit qu’il avait du mal à accepter qu’il faille avoir fait des études pour comprendre les paroles de Jésus... Jésus ne parlait-il pas simplement ? Bien sûr ! Mais il parlait aux gens de son temps, avec des mots et des images de ce temps. Et le sens de bien des mots et d’images a changé ! Il est bon de le savoir.

C’est pareil pour nos relations. Connaître une ou un autre ne va jamais de soi. Il faut un long apprentissage, qui demande effort. Sinon peut-on parler de rencontre ? Pour connaître donc quelqu’un, comme pour comprendre le sens d’un texte, un effort sera donc toujours nécessaire. D’où les notes proposées...

Pour l’évolution du sens des mots, prenons un exemple « enfant ». Le récit de la rencontre de Jésus avec des enfants (Marc 10, 13 – 16) a une portée bien plus forte si l’on sait que, contrairement à aujourd’hui, l’enfant était à l’époque sans importance. Dans cette optique, les disciples avaient donc raison de rabrouer les enfants amenés à Jésus par leurs mères. Il ne fallait tout de même pas que ces « riens du tout » dérangent Jésus et les adultes qui l’écoutaient ! L’enfant n’était pas non plus comme aujourd’hui symbole d’innocence ou de pureté...

Mais aux yeux de Jésus, le « dernier » (qu’il soit enfant, pauvre, petit, sans pouvoir...) est toujours à mettre à la première place.

 

L’homélie.

 « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements. » Les commandements ce sont les Dix Paroles de l’Alliance (1) qui nous disent comment nous comporter avec nos sœurs et frères humains et donc avec Dieu. Ces Dix Paroles se résument dans le verbe « aimer ». Mais, au cours des siècles, l’Eglise a été bien plus attentive aux mots disant la foi. Qu’ils soient les plus exacts. D’où la recherche du penser juste ou ortho ‘doxie’(2). Or, il se fait que les paroles de Jésus, comme ici, attirent surtout l’attention sur l’agir, la manière d’aimer. C’est l’agir juste ou ortho ‘praxie’. Garder les commandements se résument dans « aimer » et particulièrement : « aimer dans le respect ». Dans le respect de l’Autre, de l’Autre qui est le prochain et ainsi de l’Autre qui est Dieu. Que Dieu soit reconnu comme l’Unique, le seul qui invite les peuples à se libérer de tout esclavage (3). Et que  chaque être humain soit reconnu dans son intégrité physique, spirituelle et morale. On le voit il s’agit bien plus d’une manière de vivre que de mots plus ou moins précis ou justes.

Mais le disciple doit savoir que sans aide, il lui est impossible de vivre cette vie idéale. Il sait combien il a besoin du soutien et de l’exemple de Jésus. Aussi Jésus ressuscité enverra-t-il un autre « Défenseur » pour celles et ceux qui marcheront à sa suite, c’est-à-dire son Esprit. Personne ne sera laissé à lui-même ou « orphelin » !  A la dernière Cène, dans l’évangile de Luc (4), Jésus fait part à Simon que, vu sa faiblesse, il a prié pour lui. Nous avons ici une même promesse : Jésus priera le Père pour celles et ceux qui mettront leurs pas dans les siens.

Vient alors cette parole, à première vue étrange, qui affirme que, contrairement aux disciples, le « monde » est incapable de recevoir l’Esprit de Vérité. Il ne s’agit évidemment pas d’une condamnation du monde, encore moins d’une punition de Dieu mais de la décision libre de refuser de s’ouvrir à l’Esprit. Dans les évangiles, on rencontre un tel refus. Ainsi chez un homme qui recherche la perfection, Jésus l’invite pour y arriver à une démarche que l’homme n’avait pas prévue : vendre tous ses biens et à les donner aux pauvres (5). Tout triste, l’homme alors s’en va, car « il avait de grands biens... » Et Jésus s’incline devant sa liberté (6)

« Vous me ‘verrez’ vivant », dit Jésus. Nous avons une expression semblable dans la bouche du jeune homme en blanc qui, selon Marc, s’adresse aux femmes venues au tombeau : « Il vous précède en Galilée. C’est là que vous le ‘verrez’, comme il vous l’a dit. (7) »  De même, dans le récit des disciples d’Emmaüs (8), Luc écrit : Alors leurs ‘yeux s’ouvrirent’ et ils le ‘reconnurent’... Dans ces récits où Jésus se donne à voir, il faut éviter, je l’ai déjà dit, deux excès : 1/les comprendre comme pure illusion, ou 2/ les comprendre comme une rencontre évidente. Comme maintenant entre nous. En effet, Jésus ressuscité ne peut être ‘vu’ que par des ‘disciples’, c’est-à-dire des personnes qui ont déjà un minimum de foi. Ainsi il ne s’est jamais fait voir à Pilate, ni au grand prêtre, ni à Hérode ! Mais même si ces disciples ont déjà un minimum de foi, ils sont souvent surpris de ‘voir’ Jésus et ils hésitent à y croire !

Exemples aujourd’hui : seul un croyant (ou qui est sur le chemin de croire) peut voir Jésus vivant dans un démuni, un étranger, un prisonnier ou dans le pain eucharistique, ou dans une communauté chrétienne réunie...

(1) En gros, les 10 Paroles équivalent à notre conscience, comme le célèbre adage universel, appelé la ‘règle d’or’ : « ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’il te fasse » ou selon Jésus : fais à autrui ce que tu voudrais qu’il te fasse ».

(2) N’est-ce pas un peu fou et en tout cas d’un orgueil démesuré que d’envisager de définir Dieu ?

(3) Comme il l’a montré aux Hébreux en Egypte. Notre Dieu est le seul « dieu » qui libère, à l’opposé des faux dieux, les idoles, qui asservissent. Ainsi l’être humain, en  divinisant le pouvoir et l’argent, en devient l’esclave !

(4) Luc 22, 32.

(5) Marc 10, 21 et Luc 18, 22.

(6) Question que certains posent : sera-t-il donc « damné » ? Il faut bien lire le texte : à un moment donné un être humain a été aveuglé par son argent. Il n’est pas question de condamnation !

(7) Marc 16, 7. (8) Luc 24, 21.

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