Le texte Mt 28, 16 – 20
Au temps de Pâques, les Onze disciples s’en allèrent en Galilée, à la montagne où Jésus leur avait ordonné de se rendre. Quand ils le virent, ils se prosternèrent, mais certains eurent des doutes. Jésus s’approcha d’eux et leur adressa ces paroles : «Toute autorité (1) m’a été donnée au ciel et sur la terre. Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples, baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint Esprit (2). Et apprenez-leur à garder tous les commandements que je vous ai donnés. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. »
(1) Le missel traduit : « tout pouvoir ». Le mot « pouvoir » induit ce qui vient de l’extérieur et qui écrase. Par contre « autorité » vient du latin ‘augere’ qui veut dire ‘augmenter’. L’autorité devrait donc être : ce qui augmente, ce qui fait grandir...
(2) Le grec dit plutôt ceci : baptisez-les ou immergez-les vers le Père, le Fils et l’Esprit Saint. On pourrait donc traduire : immergez-les en vue d’entrer dans la communion du Père, du Fils et de l’Esprit Saint.
L’homélie
Chacun(e), nous avons notre petite idée sur Dieu, même si nous savons que nul ne l'a jamais vu. Cette petite idée sur Dieu, nous ne l’avons pas trouvée tout seul. D'où vient-elle ? Elle vient souvent de nos parents ou de maîtres spirituels, mais surtout, pour ceux qui l'ont fréquenté, du petit Catéchisme. Ce petit Catéchisme étudié par cœur pendant toute l'école primaire. Avec comme point d’orgue : la profession de foi. Bien souvent, il est resté viscéralement ancré en nous. Certains le connaissent encore par cœur... Mais il y a un hic !
Le hic c'est que, depuis quelques dizaines d'années, c’est-à-dire, le Concile Vatican 2, les chrétiens ont remarqué que ce petit Catéchisme n’avait quasi rien à voir avec les évangiles. Particulièrement sur Dieu, sur l’essentiel. Ainsi à la question : « Qui est Dieu ? » la réponse disait à peu près : « Dieu est un être tout puissant, infiniment bon, éternel, immuable, impassible... etc. » Une telle réponse, qui semblait tout dire, ne disait rien. Car que veulent dire ces adjectifs ? De plus, elle menait à une impasse. Comment expliquer en effet qu’un être infiniment puissant et infiniment bon puisse laisser souffrir à ce point les êtres humains ?
Quand Jésus s'exprime sur Dieu, nous sommes dans un autre monde ! Il raconte une histoire : un père avait deux fils, un fils fautif et un fils « en ordre ». Et quand, tout penaud, revient le fils fautif, le père court vers lui pour le serrer dans ses bras. Ce père est comme Dieu, dit Jésus. Ou encore : Dieu est ce berger qui a cent brebis. Si une vient à s’égarer, il la cherche jusqu'à ce qu'il la retrouve ! Ce berger est comme Dieu, dit à nouveau Jésus.
Chez Jésus donc, pas de définition sur Dieu mais des images. Si vous voulez imaginer Dieu, dit-il, pensez à un père qui aime passionnément ses deux fils, autant celui qui s'est mal conduit que celui qui est « en ordre», qui est malade de jalousie. Ou pensez à ce berger qui cherche sa brebis égarée jusqu'à ce qu'il la retrouve. On peut penser aussi à la meilleure des mamans, au meilleur des papas. Dieu est à imaginer dans cette direction-là. Les paroles de Jésus dans les évangiles et l’enseignement du catéchisme n’ont vraiment rien de commun ! Autre remarque : si la plupart des chrétiens connaissent si peu les évangiles, ce n’est vraiment pas de leur faute.
Jésus dit beaucoup d’autres choses sur Dieu. Ainsi, alors que l'on imagine si souvent Dieu comme lointain, « là-haut, là-bas », Jésus affirme qu'il est ici, parmi nous, au cœur de ce monde et même au cœur de notre cœur. Déjà le premier Testament le disait : le Seigneur Dieu est là-haut dans le ciel comme ici-bas sur la terre... Jésus va plus loin : « Le Royaume de Dieu est parmi vous », dit-il. Et même « en vous » ! Dieu est un Père au milieu de ses enfants.
Et la « Trinité » ? Même si Jésus n'a jamais utilisé ce mot, les évangiles évoquent sa réalité. Ainsi au baptême de Jésus, l'Esprit de Dieu se pose sur Jésus, comme se pose une colombe et demeure en lui. Et une voix vient du ciel : « Tu es mon Fils bien-aimé ! » Les évangiles présentent donc Jésus comme le « Fils du Père » et affirment que « l'Esprit » ou le « Souffle de Dieu » demeure en lui. Jésus en conclura vite que l'Esprit de Dieu demeure en chaque être humain, que chaque être humain est donc fille ou fils du Père.
Cette réalité affirmée par Jésus ne se démontre pas mais nous donne à croire que Dieu n'est pas un être solitaire. Il est « communion de personnes ». De personnes présentes au coeur de ce monde. Saint Paul écrit qu'il y a non pas une preuve mais un signe que l'Esprit de Dieu habite en nous. C'est, dit-il, que nous sommes capables d'appeler Dieu « Père » ou « Papa » ! Puisque nous sommes ses héritiers avec le Christ. Avec cette conséquence que si Dieu est communion de personnes, nous, qui sommes faits à son image, nous sommes appelés à vivre en communion entre nous, les êtres humains. C’est le rêve du Dieu Trinité.